lundi 24 septembre 2007

Aux mystificateurs

Monstres cyniques en cigare
Véhiculés d’orgies en vols
Et baladant l’égalité dans une cage de fer
Vous prêchiez la tristesse enchaînée à la peur
Le chant mélancolique et le renoncement
Et vos mantes démentes
Précipitant la mort sur chaque été naissant
Inventaient le cauchemar des pas cadencés dans les cirques à nègres
Aujourd’hui vos cités interdites
S’ouvrent en pleurs tardifs en serments solennels
Et vos paroles de sucre inépuisablement rampent
Entre les ruines accumulées
C’est l’heure où vos penseurs soudain pris de douleurs
Accouchent en chœur de l’unité
Et convertissent l’éclair en clinquant monotone
Mais qui cédera à l’invisible torpeur
Aux pièges tissés autour du berceau vermoulu
Qui cédera aux trompettes du baptême
Alors qu’éclatent les cordes au vent dur
Et que meurent les mascarades mordues de roc en roc
Il suffit du frisson du maïs
Du cri de l’arachide martelant la faim nègre
Pour diriger nos pas vers la droite lumière
Et à vos nuits d’alcool à propagande
A vos nuits écrasées de saluts automatiques
A vos nuits de pieux silence et de sermons sans fin
Nous opposons l’hymne aux muscles bandés
Qui salue l’étincelant départ
L’hymne insolite de l’Afrique en haillons
Déchirant les ténèbres établis pour mille ans.

David Diop (1927-1960), in Coups de pilon, Présence africaine, 1e édition 1956.


Pour une analyse éclairante de la démarche de Diop, on peut consulter l'article en ligne
d'Abdellah Hammouti (Ethiopiques, n°76).

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